Persuadée que « la santé est dans l’assiette », la Fromentellerie, située dans la Brie centrale (Seine et Marne, 77), vous propose des produits simples, sains et naturellement bons. Maylane, la fille de Yves de Fromentel, nous a ouvert les portes de cette ferme bioholistique. Et là, vous allez me dire bio quoi ?! BIOHOLISTIQUE. C’est-à-dire une agriculture qui replace le label bio à son plus haut niveau d’excellence. Respectueuse de l’homme, des animaux et de l’environnement… En somme, une nouvelle façon de penser et de vivre le bio. Curieux d’en savoir plus, nous sommes allés à la rencontre de cette jeune femme passionnée et passionnante.
Comment es-tu arrivée à travailler à la Fromentellerie ?
En fait, je suis née ici. Nous avons la ferme depuis 5 générations ! Pour mes études j’ai quitté Le domaine de Beaulieu. J’ai obtenu une licence en gestion et un master en management des entreprises à L’université catholique de Lille. Puis j’ai décidé de revenir à la ferme pour reprendre le projet de la fromagerie initié par mon père, Yves.
La Fromentellerie…
Oui. La Fromentellerie, c’est un tout ! On raisonne global et on ne dissocie pas la ferme de la fromagerie. Concrètement je suis revenue à la ferme il y a un peu plus de trois ans, en 2014. Le projet avait pris beaucoup de retard. J’ai dû le reprendre presque à zéro… N’ayant pas de fort soutien des banques, on a décidé de lancer une campagne de crownfunding via MyMajorCompany : c’est ce qui nous a permis de démarrer.
Un vaste chantier se profilait…
Il restait tout à faire : finalisation du crowndfunding, demandes de subventions, achat de matériaux, rachat de la fromagerie… Globalement, nous avons été très soutenus, notamment par les Cigales… un groupement d’investisseurs qui sont maintenant au capital de la Fromentellerie.
Et comment cela fonctionne concrètement ?
Concrètement, nous avons participé à une Bourse aux projets durant laquelle nous avons présenté notre projet de fromagerie. A notre grande surprise, il a largement recueilli l’adhésion : une dizaine de Cigales ont été séduites par l’idée et ont décidé de nous soutenir.
Piloter un projet et faire du fromage ce sont deux métiers différents…
C’est vrai. C’est pourquoi, une fois que le projet a été lancé, papa m’a dit qu’il serait bien que je fasse un stage pour apprendre à transformer. A l’été 2015, nous voilà donc parties, ma mère et moi, une semaine en stage intensif en Normandie, pour pouvoir apprendre à faire du fromage et du yaourt. Une sacrée découverte, un métier avec un vrai savoir-faire !
Combien de temps après la formation avez-vous commencé à transformer ?
On avait l’intention de commencer à transformer en septembre mais les travaux avaient pris du retard…Le vrai point de départ a été la Balade du Goût. Une fois inscrit, plus de retour en arrière possible, il fallait absolument que l’on propose un produit.
Sans fromagerie comment avez-vous fait ?!
L’idée nous est alors venue de transformer notre lait avec l’aide d’un voisin qui a produit pour nous des yaourts en utilisant notre recette bien sûr. En décembre 2016, on a lancé nos premiers yaourts mais on était plutôt dans une phase de dégustation.
Quand avez-vous officiellement lancé la production ?
On a commencé officiellement la production en mars 2017 ! Mais c’était parfois chaotique ! Je me rappelle notre première série de tommes… un vrai loupé ! On aurait dit du cailloux… Je crois qu’on avait oublié une étape de fabrication, enfin voilà on débutait vraiment…
La fabrication du fromage est une occupation qui est venue en plus de la gestion administrative. Ce n’était pas trop dur à gérer ?
Au début ça allait mais c’est devenu très rapidement compliqué ! On commençait à avoir de nouveaux marchés… On a donc fini par embaucher un fromager en mai 2016. On a commencé à se structurer.
On parle beaucoup de la Fromentellerie… Et le domaine de Beaulieu alors ?
Cette ferme existe depuis cinq générations. Mes grands parents transformaient déjà à l’époque : beurre, crème, fromages frais. De son côté, mon grand-père faisait ce qu’on appelle de l’agriculture raisonnée dans le sens où il mettait très peu de produits chimiques. Papa qui avait déjà reprit l’exploitation depuis un moment, a décidé de sauter le pas en 2009 et de convertir la ferme en bio.
A-t-il rencontré des difficultés à ce moment-là ?
Le problème est qu’en bio, on a moins de quantité, notamment avec le lait. Et puis son prix était toujours valorisé au prix conventionnel. A partir de là, on ne s’en sortait plus du tout. La seule solution pour garder l’élevage était de pouvoir monter cet atelier de transformation. Papa croyant vraiment en la complémentarité terre-élevage, il s’est lancé dans la fabrication de l’atelier et c’est comme cela qu’on a réussi à retrouver notre équilibre.
C’est ce qu’on appelle le « bioholistique » ? Peux-tu nous expliquer ce concept ?
Oui, tout à fait ! Le bioholistique c’est un bio global, ce qui veut dire concrètement que les terres nourrissent les vaches grâce aux cultures qui elles-mêmes nous donnent les céréales, le foin de prairie, le luzerne, et tout ça va nourrir nos vaches. Et nos vaches vont nourrir nos terres avec le fumier qu’elles produisent et après les vaches vont nous nourrir nous. Donc c’est vraiment un cercle vertueux !
A t’entendre, il semblerait que le bioholistique soit plus qu’un simple label ?
Tout à fait ! Aujourd’hui, c’est « facile » d’être bio surtout avec les subventions proposées aux céréaliers. C’est pour cette raison qu’en plus de se donner une obligation de moyens comme le veut le label, on se donne également une obligation de résultats dans le sens où on veut vous proposer des produits qui ont du goût, qui vous nourrissent efficacement et qui vous permettent de retrouver le goût d’antan. Cette démarche de bioholistique, c’est également avoir un impact sur l’environnement, sur les terres, les rivières… Mais aussi sur la santé et finalement sur le travail rural.
Un objectif en particulier pour l’avenir ?
Réussir à tout transformer sur place et pouvoir commercialiser tous les produits en vente directe car papa croit vraiment en cette proximité avec les consommateurs.
Et continuer à vous développer en conservant cette démarche bioholistique ?
A vrai dire, on a en tête depuis un moment de prendre des poules et des porcs mais par manque de temps, on n’a pas pu le faire encore. L’idée étant que le consommateur puisse trouver sur place tous les produits dont il a besoin. C’est typiquement ce qu’on cherche à faire. C’est pourquoi nous allons créer un petit magasin que nous allons ouvrir ici afin de proposer un large choix de produits locaux de qualité, regroupés dans le même endroit et à proximité de chez eux.
Et si on fait un zoom sur toi Maylane, tu as 26 ans, tu es responsable d’une fromagerie dans une ferme…
La ferme, c’est une vocation. Mes parents m’ont même encouragé à faire ma propre expérience ailleurs. Pendant ma vie étudiante, j’avais une vie sociale assez importante. Pour le coup, aujourd’hui, j’ai beau être proche de Paris, c’est une vie tellement fatigante, faut le dire, on travaille 24/24h. C’est retourner les fromages à 3h du matin… Bref c’est une autre vie mais je ne regrette rien !
La Fromentellerie a été une réussite. As-tu des projets à venir ?
Pour ma part, je me marie cet été donc je quitte la région pour partir vivre à Toulouse. Si on me demande si je vais être fromagère dans le sud, c’est un NON ! C’est non parce que ce n’est pas le métier dont je rêvais honnêtement…
Et que vas-tu faire à Toulouse ?
J’aimerais bien retourner dans l’événementiel car c’est ce pourquoi j’ai fais mes études. C’est aussi ce qui me plait vraiment. Après je ne dis pas que dans les années futures, je ne retournerai pas dans un métier plus rural…
Pour finir, est-ce que tu te vois reprendre la ferme un jour ?
Franchement, c’est peu probable. Et puis mon frère étant sur l’exploitation, l’idée est qu’il la reprenne. Moi je n’abandonnerai jamais complètement parce que mes parents sont ici, j’ai grandi ici. Après, je ne me vois pas reprendre l’activité à temps complet. C’est un métier de passion !
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